Acheter un logement, financer une voiture ou simplement obtenir une ligne de crédit : pour les travailleurs indépendants, ces opérations relèvent souvent du parcours du combattant. Pourtant, une solution méconnue permet de contourner ces difficultés : le portage salarial. Pourquoi les banques facilitent-elles l'emprunt des salariés portés alors qu'elles se montrent frileuses avec les freelances et les auto-entrepreneurs ? Enquête sur une injustice financière bien réelle.
Les travailleurs indépendants sont confrontés à un obstacle majeur lorsqu'ils tentent d'accéder à un emprunt : la perception du risque par les banques. En dépit d'un chiffre d'affaires parfois confortable, l'absence de fiches de paie et la variabilité des revenus constituent des freins rédhibitoires.
Les conditions exigées pour un prêt immobilier en sont la preuve : les freelances doivent souvent justifier de trois années d'activité avec des bénéfices stables et significatifs. Un auto-entrepreneur ou un consultant en société unipersonnelle (SASU, EURL) doit souvent fournir des bilans comptables, des attestations d'expert-comptable, voire accepter un apport personnel plus élevé.
"Je gagnais plus de 5 000 euros par mois en tant que consultant indépendant, mais les banques me voyaient comme un profil à risque. Elles exigeaient des garanties disproportionnées par rapport à mes revenus réels", témoigne Mathieu, développeur freelance.
Le portage salarial change radicalement la donne. Pourquoi ? Parce qu'il offre aux banques ce qu'elles adorent : un statut de salarié avec des fiches de paie et une continuité apparente des revenus. Un consultant en portage salarial peut ainsi présenter un bulletin de salaire chaque mois, même si son activité réelle est similaire à celle d'un freelance.
"Le jour où je suis passé en portage salarial, ma demande de crédit immobilier a été acceptée sans difficulté. Mon interlocuteur bancaire ne regardait plus mon statut d'indépendant, mais uniquement mes fiches de paie", explique Anne, consultante en stratégie.
Les avantages du portage salarial pour l'emprunt :
• Des fiches de paie : Les revenus sont présentés comme un salaire, ce qui rassure les banques.
• Un contrat de travail : Le consultant porté bénéficie d'un contrat de travail en CDI ou CDD avec une société de portage.
• Des cotisations sociales complètes : Il est affilié au régime général de la Sécurité sociale et cotise pour le chômage et la retraite.
• Une meilleure assurance emprunteur : Son statut salarial lui permet d'accéder à des contrats d'assurance-crédit plus avantageux.
Si les travailleurs indépendants sont souvent en difficulté face aux banques, ce n'est pas toujours une question de solvabilité réelle. C'est surtout une question de perception du risque. Un consultant indépendant peut gagner plus qu'un salarié en CDI, mais la banque préférera toujours celui qui présente un dossier "lisible" avec des bulletins de salaire.
"Les banques sont formatées pour prêter à des salariés. Elles ne savent pas analyser un compte de résultat ou un bilan comme un vrai investisseur le ferait. Elles appliquent des grilles standards qui pénalisent les indépendants", résume un courtier en prêts immobiliers.
Face à ces réalités, le portage salarial devient une solution stratégique pour les indépendants qui souhaitent accéder au crédit plus facilement. Il permet de bénéficier des avantages du salariat tout en conservant l'autonomie d'un freelance.
Avec la croissance du travail indépendant, le système bancaire devra-t-il s'adapter ? Pour l'instant, les règles ne changent pas, et le portage salarial reste une astuce efficace pour contourner les blocages. Une situation paradoxale qui pousse de plus en plus de freelances à adopter cette alternative.