Ils sont indépendants … mais salariés : zoom sur une tendance en plein essor

C’est un paradoxe à première vue : ces Français ne veulent plus de patron… mais ont choisi de redevenir salariés.
Ils sont freelances, consultants, experts ou ingénieurs, mais ont fait un choix inattendu : travailler à leur compte tout en étant couverts comme des salariés.
Derrière cette apparente contradiction, un phénomène prend racine : la montée en puissance d’un modèle hybride qui redessine en profondeur le monde du travail. 

Un phénomène discret, mais massif

C’est une révolution silencieuse. Une transformation qui échappe encore au grand public mais qui, dans les couloirs feutrés des grands groupes, des cabinets de conseil et des start-ups tech, est désormais bien connue.

D’après les derniers chiffres du Syndicat du Portage Salarial (PEPS), plus de 130 000 Français exercent aujourd’hui leur activité via un statut d’indépendant encadré, tout en étant liés à une entreprise via un contrat de travail.

👉 En 2015, ils étaient à peine 40 000. Dix ans plus tard, le modèle a plus que triplé, avec une croissance moyenne de +15 % par an.

Mais ce qui fascine, ce n’est pas seulement la vitesse de l’essor. C’est le profil des professionnels qui l’adoptent. 

Les nouveaux visages de l’indépendance

Exit l’image du freelance jonglant entre missions précaires et dossiers Urssaf.
Le modèle hybride attire aujourd’hui :

- des consultants expérimentés quittant leur CDI pour créer leur propre portefeuille client,

- des ingénieurs qui facturent leur expertise à la journée dans l’automobile, l’aéronautique ou l’IT,

- des formateurs, coachs ou chefs de projet qui cherchent la liberté sans sacrifier la protection sociale.

“J’étais en micro-entreprise, mais entre les plafonds de chiffre d’affaires, l’absence d’assurance chômage, et les banques qui me regardaient de travers… je me suis tourné vers un modèle plus stable”, confie Julien D., expert en cybersécurité, aujourd’hui "salarié autonome" chez une société de portage à Lyon. 

Pourquoi ce modèle cartonne-t-il en 2025 ?

✅ Parce qu’il répond à un besoin générationnel : sécurité + liberté

Les actifs de 30 à 50 ans veulent travailler selon leurs propres règles, mais ne sont pas prêts à renoncer à la retraite, au chômage ou à la mutuelle.

“Le salariat est devenu trop rigide, l’auto-entrepreneuriat trop risqué. Ce modèle, c’est l’équilibre parfait”, résume Claire P., consultante en RSE.

Avec ce statut, ils obtiennent :

- un contrat de travail (CDI ou CDD)

- une fiche de paie stable

- une protection sociale complète

- la liberté de choisir leurs missions, leurs clients, leur rythme de travail

✅ Parce qu’il rassure… les entreprises aussi

C’est l’autre moteur de la croissance : les grands comptes adorent ce format.
Pourquoi ? Parce qu’il élimine les zones grises juridiques. Le prestataire est salarié, donc couvert. L’entreprise cliente est sécurisée, pas de lien de subordination, pas de risque de requalification.

“Ce modèle nous permet de collaborer avec des experts pointus sans pour autant grossir la masse salariale”, explique une directrice RH d’un groupe du CAC 40.

✅ Parce qu’il permet de “scaler” son activité indépendante

Les freelances aguerris y trouvent un avantage stratégique : facturer au-delà des plafonds, déléguer toute la paperasse, profiter d’un accompagnement administratif, juridique et comptable.

Le modèle hybride devient donc un tremplin vers une activité plus sérieuse, plus rentable, parfois même vers la création d’entreprise. 

Les secteurs les plus porteurs en 2025


Taux de croissance du nombre de portés (2024) :

✔️Conseil IT & Transformation digitale +21 %

✔️Ingénierie industrielle +18 %

✔️Coaching, RH & formation +17 %

✔️Marketing digital / UX +14 %

✔️Transition énergétique / RSE +12 %

👉 Le modèle séduit particulièrement les métiers intellectuels B2B, là où la facturation à la journée (TJ) est la norme.

Un tremplin de reconversion, aussi

Le modèle attire également une autre catégorie de travailleurs : les cadres en reconversion ou les jeunes retraités actifs.

Plutôt que de chercher un CDI à temps plein ou de s’épuiser à tout gérer seuls, ils choisissent ce filet de sécurité entrepreneurial.

“J’ai quitté mon poste de directrice juridique dans un groupe pharma. Aujourd’hui, je facture mes prestations à la carte, mais je dors tranquille : je suis salariée, avec mes trimestres de retraite qui continuent de courir”, témoigne Myriam C., 58 ans.

En clair : un modèle fait pour durer

La dynamique n’est pas conjoncturelle. Elle est structurelle.

➡️ Dans une société où le salariat est de moins en moins attractif…
➡️ Où l’auto-entrepreneuriat révèle ses limites…
➡️ Et où les aspirations à l’autonomie sont de plus en plus fortes…

Ce modèle hybride coche toutes les cases : souplesse, protection, crédibilité, et gain de temps.

“On assiste à une reconfiguration complète des trajectoires professionnelles. Travailler ‘à son compte’ ne veut plus dire ‘tout seul’. Et être salarié ne veut plus dire ‘subordonné’. Une nouvelle ère s’ouvre.”
— Analyse d’Olivier Barbier, économiste du travail chez Sciences Po Paris. 

Quel avenir ?

Dans dix ans, il y a fort à parier que cette forme de travail ne sera plus considérée comme une exception, mais comme une norme.
Ni totalement indépendant, ni totalement salarié : le professionnel de demain sera… entre les deux. 

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